Groupés et créatifs pour exister Groupés et créatifs pour exister
Les agriculteurs du Var puisent dans leur imagination pour ne pas être emportés par la vague de tourisme qui déferle sur leur littoral. Et ils arrivent à faire entendre leur différence.
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Trois heures de l'après-midi, à deux pas d'un petit sous-bois de chêne-liège, une famille alsacienne s'apprête à passer à table: "Il suffit de vivre à l'envers des autres touristes. Et c'est le paradis. Nous sommes seuls au monde à dix minutes de Saint-Tropez", s'exclame ce père de famille.
Pour rien au monde depuis huit ans, il ne rate ces quinze jours de farniente sur la Côte d'Azur. Cet après-midi de rêve, il le doit en partie à l'acharnement des agriculteurs du Var qui veulent accueillir des touristes dans leurs exploitations.
Gi Senequier, membre du Ceta en tourisme "Accueil en terre varoise", est l'hôtesse de ces Alsaciens heureux. Elle accueille ses clients tous les samedis de mars à novembre dans les cinq gîtes qu'elle a construits avec son mari en 1985.
"Aujourd'hui [nous sommes en août 2002], mon mari est absorbé par ses activités d'élu. Je gère donc les gîtes et les 8 hectares de vigne. Nous avons laissé les terres de maraîchage il y a 10 ans faute de main-d'oeuvre: ici, sur la Côte d'Azur, les heures de ménage sont payées 120 francs."
La pression immobilière et foncière menace toujours plus les activités agricoles et agrotouristiques. "Depuis 1995, les agriculteurs qui voulaient développer le tourisme vert se sont pris en main pour s'imposer, y compris aux institutions agricoles. Nous voulions offrir aux touristes à la recherche d'authenticité paysanne le gîte et parfois le couvert. Nous avons créé un Ceta en tourisme. Les adhérents qui partagent l'envie de transmettre l'art de vie provençal étaient déjà dans un label comme Gîtes de France ou parfois Bienvenue à la ferme".
Le Ceta diffuse des plaquettes qui donnent la liste des adhérents, leurs services et leurs prix. Ils se forment année après année à l'accueil, à la création de gîtes, à l'élaboration d'un budget d'investissement, à la mise en place de la publicité, de dépliants mais aussi de cassettes vidéo: "Nous avons appris à ouvrir nos maisons mais aussi à parler de notre métier, à montrer nos richesses architecturales, nos sites, nos parcs naturels."
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Ceta : Centre d'études techniques agricoles.
Vie associative: deux livres de recettes provençales à leur actifLes agricultrices réunies au sein de l'association Terre varoise, réalité et promotion, ont publié leur deuxième livre de cuisine: Promenade gourmande en terre varoise. «Dans les années 1990, nous diffusions sur les marchés des recettes pour partager notre art de cuisiner», explique Gi Sénéquier. A ces recettes polycopiées, elles vont offrir un écrin de choix, un livre écrit avec le soutien appuyé des conseillères de la Mutualité sociale agricole. «Cela nous a permis de rester groupées. Nous avons écrit ce livre en 1992 à une vingtaine, avec une sacrée locomotive, Renée Merchayer, une maraîchère de Toulon qui aujourd'hui a cédé son exploitation à son gendre et à sa belle-fille. Nous présentions cinq lieux. Notre territoire c'est le littoral, mais c'est aussi la montagne.» Vrai succès de librairie, il s'écoulera à 15.000 exemplaires. Les bénéfices seront aussitôt réinvestis dans un jeu: Terre varoise, à mi-chemin entre Monopoly et Trivial Pursuit, qui fait découvrir les multiples facettes de l'agriculture varoise, du maraîchage à la vigne en passant par l'élevage, les cultures, le mimosa, les cerises et le tourisme. La présidente de l'association, Jacky Golleto, avoue: «Nous aurions pu vivre sans ces activités mais nous avons vu autre chose, connu d'autres métiers, créé un réseau d'amitiés fortes.» Le nouveau livre contient uniquement des recettes, recueillies auprès des apicultrices mais aussi des grands-mères des villages, trop heureuses de partager leur savoir-faire. Après avoir suivi des cours de formation, notamment auprès d'un cuisinier de grande renommée, Guy Géda, une douzaine d'agricultrices du GDAF de l'aire de Saint-Tropez proposent des cours de cuisine tous les jeudis à Cogolin, sauf en juillet et août. «Tout peut se refaire à la maison», insiste Gi Sénéquier. Les stagiaires, de dix à quinze au plus, arrivent le matin. Deux animatrices s'occupent des courses, apportent les légumes de leurs jardins familiaux ou achètent sur les marchés fermiers locaux. A 9 heures, elles distribuent les trois recettes du jour aux apprentis. Toute la matinée ils cuisinent ensemble, puis passent à table. «On termine par la vaisselle. Cela rajoute à la convivialité », explique Gi Sénéquier. Chaque participant débourse alors 17 euros. L'association communique ses menus chaque trimestre aux journaux et à l'office du tourisme. «Certains touristes sont abonnés. Et des gens du cru nous rejoignent aussi.» Comme Jacqueline Decaud, agricultrice, qui disait ne pas savoir cuisiner. Aujourd'hui, elle fait partie des dix animatrices, tout comme Fabienne Dillinger, comptable dans une propriété viticole. Ces cours aident à remplir les gîtes en début et fin de saison. «Nous venons de créer à partir du GDAF une association, Cuisiner côté sud», conclut Gi. |
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